3ème édition par Véronique Champeil-Desplats, professeure de droit public à l’Université de Paris Nanterre. Membre du CREDOF du Centre de Théorie et d’Analyse du Droit (UMR 7074). Vice-présidente Commission Recherche de l’Université
En matière de méthodologie, les juristes ont le plus souvent eu pour réflexe de se réapproprier des modèles provenant d’autres champs de savoir. Cette attitude présente plusieurs difficultés. Elles reposent tout d’abord sur une part de fiction. Les juristes ne sont ni des mathématiciens, ni des physiciens, ni des biologistes, ni des historiens, ni encore des sociologues. Tout au mieux font-ils comme s’ils Tétaient. Par ailleurs, bien que les réappropriations méthodologiques opérées visent fréquemment à ériger le savoir juridique au rang de science, cette prétention n’est pas exempte d’ambiguïtés, ni de malentendus. Cela tient essentiellement au fait que, dans le domaine juridique, il existe deux niveaux de langage, à savoir le langage du droit lui-même et le langage du savant qui l’appréhende. Du point de vue d’une méthodologie analytique, ces deux niveaux devraient être rigoureusement distingués. Toutefois leur confusion est régulièrement entretenue. Pour certains, en effet, les juristes feraient d’autant plus preuve de science qu’ils se révèleraient capables de reproduire, parfois en vue de les prédire, les méthodes, les raisonnements et les solutions retenus par les autorités normatives qu’ils observent. Pour d’autres également, le métier de juriste est avant tout celui d’un bon connaisseur de la technique du droit positif. Cette proximité gardée à l’égard de l’objet analysé est mal comprise par les autres sciences humaines et sociales qui situent les efforts de distanciation et d’objectivation au rang des premiers réquisits méthodologiques du savoir scientifique.
Dès lors, les réflexions méthodologiques dépassent les enjeux internes au champ juridique. Elles sont cruciales pour qui veut comprendre les déplacements épistémologiques dont sont porteuses l’évolution des techniques de connaissance (technologies de l’information et de la communication, dématérialisation des corpus, sciences ouvertes) et l’affirmation d’objets transverses (environnement, bioéthique, santé, sécurité, globalisation…) qui défient les découpages disciplinaires hérités du siècle dernier. Cette troisième édition a été enrichie de nouveaux développements sur le pragmatisme et les méthodes de l’interdisciplinarité.
Parution le 13/07/2022 chez Dalloz dans la collection « Méthodes du droit » ISBN978-2-247-21694-9
https://www.lgdj.fr/methodologies-du-droit-et-des-sciences-du-droit-9782247216949.html